LA TERRE OÙ EST NÉ LE SOLEIL / 2017 - 2021
Avec les outils associés de la photographie et de l’anthropologie, Julien Lombardi a installé depuis 2017 son laboratoire d’expérimentation visuelle sur un territoire enclavé dans une vallée désertique du centre du Mexique. Wirikuta est la terre des mythes fondateurs et de nombreuses divinités pour les Indiens Huichols qui, chaque année, y viennent en pèlerinage pour honorer la naissance du soleil et du feu en accomplissant des cérémonies chamaniques. Ce territoire sacré est aujourd’hui mis en danger par les industries minières, agricoles et touristiques. Toutes les stigmates de la colonisation et de la globalisation, sans restrictions, s’expriment dans cette zone-frontière de ressources pour le capitalisme extractiviste.
Comment survivre à ces conditions de production du monde actuel, où les activités humaines concourent à l’assujettissement et la destruction irrémédiable ? Comment représenter ces phénomènes avec l’appareillage photographique qui est lui-même, techniquement et chimiquement, lié à l’extraction des minerais et ressources naturelles ?
Plutôt que d’idéaliser ou d’exotiser le Mexique et ses habitants, et en étant conscient des risques liés à l’appropriation culturelle, il s’agit pour l’artiste de dépasser la dénonciation des catastrophes et de créer un autre espace, associant formes documentaires et poétiques, pour proposer une autre narration du monde, dans une logique décoloniale. Il associe pour cela différents outils et actes photographiques, par le prélèvement et le constat, en tirant un parti plastique de la contamination de ses images par le soleil, la poussière et le lieu-même.
En déplaçant l’objectivité du langage documentaire, Julien Lombardi informe ses images d’un réalisme fantastique, afin de nous permettre d’entrevoir ce qui échappe à la représentation : le magique et l’invisible – en somme, tout ce qui relie les différentes formes de vie associées en un lieu dont la mise en péril met en évidence leur propre fragilité. Cette poétique paradoxale permet de raviver la sensibilité du regard porté sur un paysage naturel et social compris comme acteur vivant d’un monde en friction.
PASCAL BEAUSSE 
Responsable collection photographie du Centre national des arts plastiques. 
Critique d'art et commissaire d'exposition.

Since 2017, with the combined tools of photography and anthropology, Julien Lombardi has set up his laboratory for visual experimentation in a landlocked territory in a desert valley in central Mexico. Wirikuta is the land of founding myths and numerous divinities for the Huichol Indians, who come here every year on pilgrimage to honour the birth of the sun and fire by performing shamanic ceremonies. This sacred territory is now threatened by the mining, farming and tourism industries. All the stigmata of colonisation and unrestricted globalisation are expressed in this resource frontier for extractivist capitalism.
How can we survive these conditions of production in today's world, where human activities contribute to subjugation and irreparable destruction? How can we represent these phenomena using photographic equipment that is itself technically and chemically linked to the extraction of minerals and natural resources?
Rather than idealizing or exoticizing Mexico and its inhabitants, and mindful of the risks involved in cultural appropriation, the artist's aim is to go beyond the denunciation of catastrophes and create another space, combining documentary and poetic forms, in order to propose a different narrative of the world, within a decolonial logic. To do this, he combines different photographic tools and acts, by taking samples and making observations, taking advantage of the contamination of his images by the sun, the dust and the place itself.
By displacing the objectivity of documentary language, Julien Lombardi imbues his images with a fantastic realism that allows us to glimpse that which escapes representation: the magical and the invisible - in short, everything that links the different forms of life associated with a place whose endangerment highlights their own fragility. This paradoxical poetics revives the sensibility of looking at a natural and social landscape understood as a living actor in a world in friction.

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